Ferruccio Busoni to Philipp Jarnach arrow_backarrow_forward

London · October 5, 1919

Facsimile
Diplomatic transcription
Reading version
XML
Telephone, Mayfair 1108.
Cable, Merveldene London.
5 Okt. 1919.
West Wing.
Outer Circle.
Regent’s Park.N.W.

Mon cher ami Jarnach,

come je regrette que Vous
ne soyez pas ici! Pas pour
Vous, mais pour moi. Vous
ne decouvreriez presque rien,
comme moi je n’ai rien
decouvert, mais Vous m’ai-
deriez à supporter cette
absence de decouvertes.

– Vous ne pourriez Vous
imaginez au juste, comme
tout a baissé, ici comme
à Paris; que le monde

5 Okt. 1919.

Mon cher ami Jarnach,

come je regrette que Vous ne soyez pas ici ! Pas pour Vous, mais pour moi. Vous ne decouvreriez presque rien, comme moi je n’ai rien decouvert, mais Vous m’aideriez à supporter cette absence de decouvertes.

– Vous ne pourriez Vous imaginez au juste, comme tout a baissé, ici comme à Paris ; que le monde est devenu commun et mesquin – ou (ce qui est probable) comme cette qualités sont devenues evidentes, Sont monté à la surface, – les masques sont tombés. Tout a pris un aspect indifferent et etroit ; enfin : on ne se soucie que de la securité et de la nourriture, comme aux temps préhistoriques. – Je goute l’amenité d’habiter au milieu de Regent’ Park, ou Maud Allan m’offre une agréable et large hospitalité. Mais c’est solitaire, et monotone, et loin du centre. Le reveil est toujours plein de charme, la vue sur des arbres luxueux et dorés par un soleil d’automne donne un bonheur attendué. – Mais les soirées sont méchantes, elles se perdent dans l’obscurité silencieuse et dans des heures d’une vague durée ; les evenements y sont défaut ; c’est comme dans une pièce de Maeterlinck. – Au dehors, loin, la vie journalière d’une intensité que j’ avais oublié : une somme enorme de petites existences. –

Une oeuvre d’A. France me tient bonne Compagnie, m’amuse et me donne à reflechir. C’est un recueil de vieux feuilletons, reunis en quatre volumes et nommés : la Vie litteraire. Il est magnifique, France, quand il attaque Zola ; plus aimable quand il se plait dans une douce filosofie. –

Nous avons, pour voisins, une colonie d’Aveuglès par la guerre : ce qui me repousse, plutôt que m’emouve. – On les admire ! – (Que c’est laid !)

Comme Musique, il n’y a rien à conter. C’est tout-à-fait pauvre et secondaire.

La grève pèse.

Comme je regrette, que Vous ne soyez pas ici, je le répète. J’ai peur de m’oublier moi-même, – on ne s’entend pas. On ne connait pas les „élements“ de nos discussions en Suisse. Je crois, qu’on me trouve faibli. – Embrassez Barbara-Ursula. –

Je Vous salue affectueusement.

Votre F. Busoni

Avez vous traité avec Hug ?

                                                                
<div xmlns="http://www.tei-c.org/ns/1.0" type="split"> <fw xml:lang="en">Telephone, Mayfair 1108. <lb/>Cable, Merveldene <placeName key="E0500047">London</placeName>.</fw> <opener><dateline><foreign xml:lang="de">5 Okt. 1919.</foreign> <fw xml:lang="en">West Wing. <lb/>Outer Circle. <lb/>Regent’s Park.N.W.</fw></dateline> <salute>Mon cher ami <persName key="E0300376" type="automated" nymRef="Philipp Jarnach">Jarnach</persName>,</salute></opener> <p>come je regrette que Vous <lb/>ne soyez pas ici! Pas pour <lb/>Vous, mais pour moi. Vous <lb/>ne decouvreriez presque rien, <lb/>comme moi je n’ai rien <lb/>decouvert, mais Vous m’ai <lb break="no"/>deriez à supporter cette <lb/>absence de decouvertes.</p> <p type="pre-split">– Vous ne pourriez Vous <lb/>imaginez au juste, comme <lb/>tout a baissé, ici comme <lb/>à <placeName key="E0500012">Paris</placeName>; que le monde </p></div>
2Facsimile
2Diplomatic transcription
2XML

est devenu commun
et mesquin – ou
(ce qui est probable)
comme cette qualités
sont devenues evidentes,
Sont monté à la surface,
– les masques sont tombés.
Tout a pris un aspect
indifferent et etroit;
enfin: on ne se soucie
que de la securité
et de la nourriture,
comme aux temps
préhistoriques. – Je
goute l’amenité
d’habiter au milieu
de Regent’ Park, ou

                                                                
<div xmlns="http://www.tei-c.org/ns/1.0" type="split"><p type="split"> est devenu commun <lb/>et mesquin – ou <lb/>(ce qui est probable) <lb/>comme cette qualités <lb/>sont devenues evidentes, <lb/>Sont monté à la surface, <lb/>– les masques sont tombés. <lb/>Tout a pris un aspect <lb/>indifferent et etroit; <lb/>enfin: on ne se soucie <lb/>que de la securité <lb/>et de la nourriture, <lb/>comme aux temps <lb/>préhistoriques. – Je <lb/>goute l’amenité <lb/>d’habiter au milieu <lb/>de Regent’ Park, ou </p></div>
3Facsimile
3Diplomatic transcription
3XML

Maud Allan m’offre
une agréable et large
hospitalité. Mais c’est
solitaire, et monotone, et
loin du centre. Le reveil
est toujours plein de
charme, la vue sur
des arbres luxueux
et dorés par un soleil
d’automne donne un
bonheur attendué. – Mais
les soirées sont méchantes,
elles se perdent dans
l’obscurité silencieuse

                                                                
<div xmlns="http://www.tei-c.org/ns/1.0" type="split"><p type="split"> <persName key="E0300425">Maud Allan</persName> m’offre <lb/>une agréable et large <lb/>hospitalité. Mais c’est <lb/>solitaire, et monotone, et <lb/>loin du centre. Le reveil <lb/>est toujours plein de <lb/>charme, la vue sur <lb/>des arbres luxueux <lb/>et dorés par un soleil <lb/>d’automne donne un <lb/>bonheur attendué. – Mais <lb/>les soirées sont méchantes, <lb/>elles se perdent dans <lb/>l’obscurité silencieuse </p></div>
4Facsimile
4Diplomatic transcription
4XML

et dans des heures
d’une vague durée;
les evenements y sont
défaut; c’est comme
dans une pièce de
Maeterlinck. – Au dehors,
loin, la vie journalière
d’une intensité que j’
avais oublié: une
somme enorme de
petites existences. –

Une oeuvre
d’A. France me tient
bonne Compagnie, m’amuse
et me donne à reflechir.

                                                                
<div xmlns="http://www.tei-c.org/ns/1.0" type="split"><p type="split"> et dans des heures <lb/>d’une vague durée; <lb/>les evenements y sont <lb/>défaut; c’est comme <lb/>dans une pièce de <lb/><persName key="E0300027">Maeterlinck</persName>. – Au dehors, <lb/>loin, la vie journalière <lb/>d’une intensité que j’ <lb/>avais oublié: une <lb/>somme enorme de <lb/>petites existences. –</p> <p type="pre-split">Une oeuvre <lb/>d’A. France me tient <lb/>bonne Compagnie, m’amuse <lb/>et me donne à reflechir. </p></div>
5Facsimile
5Diplomatic transcription
5XML

C’est un recueil de
vieux feuilletons, reunis
en quatre volumes et
nommés: la Vie litteraire.
Il est magnifique, France,
quand il attaque Zola;
plus aimable quand il
se plait dans une douce
filosofie. –

Nous avons, pour voisins,
une colonie d’Aveuglès par
la guerre: ce qui me
repousse, plutôt que
m’emouve. – On
les admire! – (Que c’est laid!)

                                                                
<div xmlns="http://www.tei-c.org/ns/1.0" type="split"><p type="split"> C’est un recueil de <lb/>vieux feuilletons, reunis <lb/>en quatre volumes et <lb/>nommés: la Vie litteraire. <lb/>Il est magnifique, France, <lb/>quand il attaque Zola; <lb/>plus aimable quand il <lb/>se plait dans une douce <lb/>filosofie. –</p> <p>Nous avons, pour voisins, <lb/>une colonie d’Aveuglès par <lb/>la guerre: ce qui me <lb/>repousse, plutôt que <lb/>m’emouve. – On <lb/>les admire! – (Que c’est laid!)</p> </div>
6Facsimile
6Diplomatic transcription
6XML

Comme Musique, il n’y a rien à conter.
C’est tout-à-fait pauvre
et secondaire.

La grève pèse.

Comme je regrette, que Vous
ne soyez pas ici, je le
répète. J’ai peur de
m’oublier moi-même, –
on ne s’entend pas.
On ne connait pas les
„élements“ de nos
discussions en Suisse.
Je crois, qu’on me trouve
faibli. – Embrassez
Barbara-Ursula. –

Je Vous salue affectueuse-
-ment.

Votre F. Busoni

Avez vous traité avec Hug?

                                                                
<div xmlns="http://www.tei-c.org/ns/1.0" type="split"> <p>Comme Musique, il n’y a rien à conter. <lb/>C’est tout-à-fait pauvre <lb/>et secondaire.</p> <p>La grève pèse.</p> <p>Comme je regrette, que Vous <lb/>ne soyez pas ici, je le <lb/>répète. J’ai peur de <lb/>m’oublier moi-même, – <lb/>on ne s’entend pas. <lb/>On ne connait pas les <lb/>„élements“ de nos <lb/>discussions en <placeName key="E0500092">Suisse</placeName>. <lb/>Je crois, qu’on me trouve <lb/>faibli. – Embrassez <lb/><persName key="E0300664">Barbara</persName>-<persName key="E0300664">Ursula</persName>. –</p> <closer><salute>Je Vous salue affectueuse <lb break="no" rend="after:-"/>ment.</salute> <signed>Votre <persName key="E0300017">F. Busoni</persName></signed></closer> <postscript> <p>Avez vous traité avec Hug?</p> </postscript> </div>

Document

warningStatus: unfinished XML Facsimile Download / Cite

Provenance
Deutschland | Berlin | Staatsbibliothek zu Berlin · Preußischer Kulturbesitz | Musikabteilung mit Mendelssohn-Archiv | Nachlass Ferruccio Busoni | |

proof Kalliope

Condition
Der Brief ist gut erhalten.
Extent
, 6 beschriebene Seiten
Hands/Stamps
  • Hand des Absenders Ferruccio Busoni, Brieftext in schwarzer Tinte, in lateinischer Schreibschrift
  • Hand des Archivars, der mit Bleistift die Signaturen eingetragen, eine Foliierung vorgenommen und das Briefdatum ergänzt hat
  • Hand des Archivars, der die Zuordnung innerhalb des Busoni-Nachlasses mit Rotstift vorgenommen hat
  • Bibliotheksstempel (rote Tinte)
Image source
Staatsbibliothek zu Berlin · Preußischer Kulturbesitz: 123456

Editors in charge
Christian Schaper Ullrich Scheideler
prepared by
Revision
May 12, 2022: unfinished (currently being prepared (transcription, coding))
Direct context
Preceding Following
Near in this edition
Previous editions
Beaumont 1987, S. 291 f.